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Comment poser des questions pertinentes auxquelles on vous répondra sans mentir ?

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Est-ce que vous avez déjà menti en répondant à une question ? Evidemment que oui. Moi aussi. Est-ce que ça fait de nous des mauvaises personnes ? Je vais vous rassurer, sans doute pas : la plupart du temps, le problème est dans la question, pas dans la réponse. Alors comment poser des questions pertinentes ? Comment s’assurer qu’on ne va pas vous mentire éhontément pour les meilleures raisons du monde ? Commençons par une mise en situation.

Pour rappel, cet épisode s’inscrit dans le cadre de notre dossier sur les questions dans la vente.

Qu'allez-vous trouver dans cet article ?

Nous mentons avec les meilleures intentions du monde

« Papa, il est joli mon dessin ? » Sacrée question rhétorique pas vrai ? Qu’est-ce que vous voulez répondre d’autre que « oui » ? Rien, évidemment. Et pourtant, si votre rejeton n’est pas aussi talentueux que mes filles (Prune, Violette, Papa aime tous vos dessins !), il y a des chances pour que certains dessins, parfois, soient un peu surnotés quand on les qualifie de « jolis ».

Mais sauf à être un monstre sans coeur, vous ne pouvez pas faire autrement que de mentir, quand vous sentez toute la candeur et l’espérance du monde dans le regard de votre progéniture.

Pourtant vous connaissez la sagesse populaire : il n’y a pas de mauvaise question. « Ou alors seulement celles qui ne sont pas posées ». Eh bien, je vais briser un mythe : c’est faux.

Il y a des mauvaises questions. Des questions auxquelles on est plus ou moins obligés de répondre de façon insincère.

Le problème, c’est que la meilleure façon de découvrir le monde et d’apprendre c’est effectivement de poser des questions – et c’est bien pour ça que les enfants en posent autant. Donc, vous devriez poser des questions. Tous les jours. Le plus possible. Mais juste avant, vous devriez vous demander ce que vous cherchez à savoir en les posant. (Rappelez-vous, on en avait déjà parlé dans l’épisode consacré au deuxième pilier de toute vente réussie, avec la force du « pourquoi »)

Pourquoi poser des questions (pertinentes) ?

La question elle est vite répondue : parce que vous voulez tirer de la valeur des réponses. Si par exemple vous êtes au tout début du développement d’un nouveau marché ou d’une nouvelle solution, vous allez chercher, en posant des questions, à comprendre l’état actuel des choses pour identifier des problèmes que vous allez pouvoir résoudre.

De la même manière, si vous êtes sur un marché plus établi, mais que vous rencontrez de nouveaux prospects, vous allez mener un entretien de découverte, passant par un questionnement intelligent pour que ces prospects vous racontent leur histoire et que vous puissiez comprendre où ils en sont aujourd’hui.

Donc oui, évidemment, il est toujours pertinent de poser des questions – et bien trop de commerciaux n’en posent pas assez.

Mais une question mal posée, ou tout simplement une mauvaise question, peut être encore pire que pas de question du tout. Et ce pour une raison simple : vous allez vous retrouver soit avec une réponse fausse (votre interlocuteur vous aura menti, et on vient de voir que c’est sans doute avec les meilleures intentions du monde), soit avec une réponse fumeuse qui va vous envoyer sur une mauvaise piste.

Voyons ce que ça donne en pratique, avec un exemple simple.

Ma femme me ment-elle ? (Spoiler: Oui)

Ma tendre épouse est une bricoleuse née. Biberonnée aux loisirs créatifs, élevée à la pâte à sel. Ca tombe bien, le secteur des loisirs créatifs frôle une croissance annuelle moyenne à deux chiffres sur la dernière décennie : c’est donc fortement porteur.

Comme plusieurs milliards d’êtres humains sur terre, ma femme possède et utilise régulièrement un smartphone, bien qu’elle en soit sans doute un peu moins fan que la moyenne.

Sur la base de ces informations, il est tentant d’explorer l’intersection des deux mondes : pourquoi ne pas me lancer dans le développement d’une application mobile compilant des tutos de bricolage.

Dans mon hypothèse, il faut que je commence par pratiquer mes gammes de marketing, en allant interroger ma future cliente, pour vérifier mon hypothèse business. Allez venez avec moi, je vous emmène dans notre sous-sol dans la pièce dédiée où ma femme est en train de manier le pistolet à colle.

Avec une grande subtilité, je lui pose la question suivante : « Dis, tu aimes bricoler hein? » et elle de répondre « Oui ».

« Et tu as toujours ton téléphone sur toi, pas vrai ? » question qui me vaut un nouveau « Oui ».

« Je vois que tu as des bouquins de bricolage sur l’étagère derrière, macramé, pate à sel, peinture avec les doigts… Est-ce que ça serait pas fantastique si tu avais tout ça dans une seule app sur ton téléphone ? » Et me voilà, vous l’aurez deviné, à l’orée d’une troisième réponse incroyablement édifiante « Oh oui, ça serait chouette ! ».

Je peux donc remonter joyeusement jusqu’à mon bureau, en cochant la case « enquête clients » dans ma liste de choses à faire avant de lancer mon app de bricolage. L’adhésion étant tellement évidente, mon produit va cartonner, c’est sûr.

Vraiment ?

De mauvaises questions mènent à de mauvaises réponses

Avançons rapidement de quelques mois, j’ai maintenant développé mon application que je vends pour 4€99 sur le Play Store. Je descends voir ma femme (je réalise à cet instant qu’avec mon scenario, vous allez croire qu’elle est séquestrée dans notre sous-sol, rassurez-vous c’est pas le cas !), pour voir si elle compte l’acheter et l’utiliser.

  • « Alors, qu’est-ce que tu penses de mon application ? »
  • « Je sais pas, je l’ai pas encore installée »
  • « Attends, on va l’installer ensemble »
  • « Oui mais pas maintenant, là j’ai les mains pleines de peinture, je vais pas tripoter mon téléphone »
  • « Mais comment tu sais quoi faire dans ton bricolage, alors ? »
  • « Ca fait 30 ans que je bricole, crois moi je sais me servir d’un pistolet à colle ! Et si j’ai un doute, j’appelle ma mère. »
  • « Mais du coup, les livres sur l’étagère derrière toi… »
  • « Ah ça ? Je les ai reçus à Noël, franchement je m’en sers presque jamais »

Bref, je vais pas vous refaire une pièce de théâtre en trois actes, il est clair que je me suis planté avec mon « enquête client ». Et pourtant, ma femme n’a pas cherché volontairement à me lancer sur une fausse piste ! C’est juste que de mauvaises questions engendrent de mauvaises réponses.

Dilbert pose des questions pertinentes (lui) – par Scott Adams – dilbert.com

Etait-il possible de poser des questions plus pertinentes ? (Spoiler, encore oui)

On va remonter le temps ensemble, revenir à ma première tentative et tenter de l’améliorer. Déjà, puisque mon intention est de développer une App pour Smartphone, il faudrait commencer par là en posant une question du style:

  • « Qu’est-ce que tu fais d’habitude avec ton téléphone ? »
  • « Oh, des coloriages, des jeux de logique, scroller Instagram… »
  • « C’est quoi le dernier truc que tu aies fait avec ? »
  • « Je voulais faire des gateaux avec les filles, donc j’ai cherché une recette »
  • « Tu as utilisé l’appli Marmiton ? »
  • « Non, Google »

Premier indice

Ma femme utilise son smartphone, mais assez peu les applications en dehors des jeux et certains réseaux sociaux, malgré un cas d’usage adjacent à ma cible du bricolage avec la patisserie. Creusons un peu le sujet.

  • « J’ai vu des bouquins de bricolage sur l’étagère derrière toi, d’où ils viennent ? »
  • « Ah ça ? Je les ai reçus à Noël, franchement je m’en sers presque jamais »
  • « C’est quoi le dernier bouquin de bricolage que tu aies acheté pour toi ? »
  • « Maintenant que tu le dis, le bouquin sur le macramé, c’est moi qui l’ai acheté. Ca faisait longtemps que j’en avais pas fait et je cherchais des conseils spécifiques. »

Nous voilà donc plus avancés : un bricoleur avancé n’a pas besoin de conseils génériques, mais peut ponctuellement avoir des besoins spécifiques. Cette conversation donne donc deux orientations possibles. Soit je reste sur mon idée d’une App de bricolage à large spectre, mais mon avatar client n’est certainement pas quelqu’un qui bricole autant que ma femme – plutôt le papa qui doit faire un truc plus original qu’un collier de pâtes avec ses enfants pour la fête des mères – soit, il faudrait que je spécialise mon offre pour un segment beaucoup plus niché, par exemple, des techniques avancées de macramé.

Ma femme n’a jamais pu me mentir dans cette conversation, parce que je n’ai jamais parlé de mon idée (donc elle ne pouvait pas avoir peur de heurter mes sentiments).

C’est une première leçon importante qui devrait déjà améliorer grandement votre façon de poser des questions : ne mentionnez jamais votre idée, service ou produit quand vous interrogez un prospect. En lieu et place, appliquez ces trois règles simples :

Les 3 règles simples pour poser des questions pertinentes auxquelles on vous répondra sans mentir:

  1. Parlez de la vie de vos prospects, pas de votre idée/produit/service/solution
  2. Posez des questions sur des éléments précis situés dans le passé, pas sur des généralités ou des opinions s’appliquant dans le futur. (version courte de cette règle: parlez du passé, pas du futur)
  3. Parlez moins, et écoutez plus (ça, on en a déjà parlé dans l’épisode sur l’écoute active, je vais pas vous refaire l’article !)

Il y a un principe simple à retenir, et vous allez voir que c’est du bon sens. Les conversations sont de mauvaise qualité par défaut. Pensez à la dernière réunion dans laquelle vous vous êtes ennuyés : il y a eu des échanges pas vrai, mais ça a apporté quoi ? Et si votre oncle un peu raciste ramène des sujets délicats sur la table à chaque fête de famille, c’est sans doute que personne ne guide la conversation – ce qui serait étrange je vous l’accorde, je me verrais pas distribuer des ordres du jour avant que chacun s’assoie à table à Noël.

Votre boulot, en tant que commercial, c’est de prendre le contrôle de la conversation avec vos prospects. Et d’orienter cette discussion avec les bonnes questions pour en retirer les bonnes informations.

Bon, maintenant qu’on a posé les bases, on va pouvoir passer aux techniques avancées !

Cherchez l’engagement, pas les compliments

Jusque récemment, un des services que j’avais en portfolio était une application de collecte des données de chantier. Je n’étais pas le seul à la promouvoir, on était deux responsables commerciaux et un directeur technique, dans une structure s’approchant de l’intrapreunariat.

Ce qui m’a rapidement marqué, c’est que les compte-rendus d’entretiens avec des clients et prospects étaient très différents, entre ceux venant de notre directeur technique d’une part, et de mon collègue responsable commercial ou de moi de l’autre.

A chaque fois que notre directeur technique rencontrait un prospect, il s’avérait que celui-ci a-do-rait toutes les fonctionnalités de l’App, en suggérait des nouvelles et allait à coup sur investir et équiper toutes ses équipes dès que ces nouvelles fonctionnalités seraient développées.

Mon expérience pour l’Europe et celle de mon collègue en charge du reste du monde était assez différente : on revenait régulièrement avec des engagements du client à utiliser certaines sections du service.

Pourquoi ce grand écart entre des prospects enthousiastes sur le package complet et en demandant toujours plus avant de s’engager d’un côté, et d’autres prospects prêts à acheter aujourd’hui une petite portion de la solution ? Tout simplement une différence d’approche.

Notre directeur technique, c’est un passionné, amoureux de son produit. Et si vous écoutez régulièrement ce podcast, vous savez que c’est malheureusement un péché capital pour le commerce. Résultat, son questionnement était très orienté. Et il poussait les prospects à mentir, absolument comme dans l’exemple précédent de ma femme et de l’App de bricolage.

Règle simple : creusez sous les compliments

Si vous abordez un prospect en lui expliquant que vous avez développé ça, ça, ça et ça, que ça vous a pris du temps mais que c’est vraiment génial, il va forcément vous répondre avec un compliment. « Wow, c’est impressionnant, chapeau ! »

Et si vous enchaînez derrière en demandant: « Ah oui, ça vous plait, vous pourriez vous en servir ? » Il va forcément vous répondre une variation de « Oui mais… », que ce soit « Oui, je vais voir avec bidule et machin », « Oui, mais il me faudrait aussi une fonction grille-pain » ou « Oui, dites-donc vous avez développé ça tout seul ou vous avez une équipe qui travaille avec vous ? ».

Trois rejets polis, mais trois rejets, ne vous faites pas avoir. S’il y a d’autres personnes qui doivent décider, rebondissez dessus et demandez un engagement : est-ce qu’ils sont disponibles maintenant ? On va les voir ? Si non, on peut prendre nos agendas ensemble et caler une rencontre ?

Pour ce qui est de la fonction grille-pain, questionnez le besoin. Pourquoi est-ce qu’il vous faut un grille pain ? Comment vous faites aujourd’hui ? Quelles solutions alternatives vous utilisez ? Si le besoin est bidon – ou le problème pas vraiment douloureux, vous le verrez vite. Sinon, vous pouvez remercier votre prospect, vous venez d’apprendre un truc VRAIMENT utile !

Et enfin, le troisième « Oui mais » est une façon pour votre interlocuteur de prendre le contrôle de la discussion et de l’amener à un échange diplomatique de politesses. Vous n’êtes pas là pour ça, reprenez la main.

Les compliments font chaud au coeur, mais ils ne sont pas utiles à votre démarche commerciale. Acceptez-les, remerciez votre interlocuteur et allez chercher la vérité un peu moins belle qui se cache derrière !

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Si c’est flou, il y a un loup

Oui, je sais, c’est un assez mauvais intertitre : tenez allez donc me mettre 5 étoiles sur Apple Podcast, et marquez en commentaires que vous le faites MALGRÉ les mauvais intertitres ! Mais revenons à nos moutons.

Il y a trois formes de réponses floues, apprenez à les détecter et à les contrer :

  • Les affirmations générales (« D’habitude, je fais ça », « Je fais toujours ci », « Je fais jamais ça »)
  • Les promesses de lendemains qui chantent (« Je ferais… » avec « s » et « Je ferai… » sans « s », le futur et le conditionnel)
  • Les « peut être » et les hypothèses (« Je pourrais… »)

Parfois, ces réponses ressemblent tellement à un signal positif que ça peut prêter à confusion.

Par exemple, si votre prospect vous dit « Ah oui, j’achèterais certainement ça ! ». Ca sonne terriblement bien, pas vrai ? Et pourtant, c’est flou. Quand ? Pourquoi ? Comment ? Il ne peut pas répondre à ces questions. Et vous avez contrevenu à ce pacte simple :

Vos prospects possèdent l’expérience, les problèmes et le passé, vous possédez le savoir-faire, les solutions et le futur.

Vos questions doivent porter sur des faits dans le passé. Si vous faites votre part du boulot, ils n’ont pas le droit de vous répondre avec des opinions sur le futur !

Souvent, le flou vient de vous

Il y a toute une série de questions qui appellent du flou. Voilà quelques exemples :

  • Pourriez-vous faire ceci ?
  • Seriez-vous susceptible de faire cela ?
  • Qu’est-ce que vous faites généralement quand…
  • Est-ce que vous pensez que…
  • Est-ce que vous vous verriez faire ça ?

Ces questions ne sont pas à proprement parler des péchés capitaux. Il y a pire, je vous rassure. Mais vous ne devez jamais les laisser se promener toutes seules. Rebondissez derrière, et ancrez la réponse dans le passé et dans des faits. Dissipez le flou !

Par exemple, si vous avez demandé « Qu’est-ce que vous faites généralement quand bidule et chose » et que votre prospect vous a répondu « Ah oui, ça m’arrive tout le temps », enchaînez avec : « Ah oui, et c’était quand la dernière fois ? » et derrière assurez-vous qu’il vous explique bien tout.

Quand votre interlocuteur est flou (ou peu coopératif), il est grand temps pour vous de poser des questions pertinentes… encore plus pertinentes ! – par Scott Adams – dilbert.com

Cas pratique : l’illusion du fournisseur unique

Je vais vous donner un exemple concret. Aujourd’hui, mes équipes commercialisent des tuyaux, vannes, capteurs et actionneurs, en gros tout ce qui constitue un système de tuyauterie dans de nombreux types de plastiques. Pour chacune de ces catégories, on a des concurrents, et souvent des bons. Notre force, et un de nos premiers arguments, c’est qu’en travaillant avec nous, un client aura un fournisseur unique pour l’ensemble de son système. Moins de paperasse, de procédures d’achat, une logistique et une gestion de stock simplifiée, bref je vous fais pas l’article.

Donc, à chaque rencontre avec un prospect, nos commerciaux amènent le sujet sur le tapis. « Dites, vu la taille et la complexité de vos projets, ça doit être un cauchemar si ensuite dans chaque sous-catégorie comme, au hasard, les systèmes de tuyauterie, vous vous éparpillez encore entre plusieurs fournisseurs ».

Et très très souvent, les prospects répondent : « Ah nous, on fait en sorte d’avoir le moins de fournisseurs possible, en regroupant les catégories ».

Vous seriez surpris du nombre de commerciaux qui, se satisfaisant de cette réponse, découvrent dépités quelques semaines plus tard que les commandes qu’ils attendaient ne sont pas tombées, ou seulement partiellement – par exemple, juste les vannes.

La parade :

Heureusement, on a aussi une bonne partie de l’équipe qui ne se satisfait pas de ce flou, et qui creuse un peu :

  • « Ah oui, et par exemple sur le projet Bidule que vous menez en ce moment, vous avez combien de fournisseurs ? »
  • « Sur celui là c’est un peu particulier, on en a deux : on a fait tuyaux et vannes d’un côté, capteurs et actionneurs de l’autre »

Tiens tiens. Là, vous pouvez creuser pour comprendre ce qui s’est passé sur ce projet précis, ou alors éclaircir encore un peu plus le flou :

  • « Bon deux, ça doit encore être gérable je pense. C’est quand la dernière fois que ça vous est arrivé d’en avoir encore plus ? »
  • « Ah, sur le projet Chose, c’était l’enfer. J’ai repris le projet au dernier moment, et c’était plus ou moins géré en direct par les achats avant, résultat j’avais carrément plusieurs fournisseur par sous-catégorie. »
  • « Wow, dur. Ca a eu des conséquences ? »
  • « Oui, c’est clairement l’exemple type de la fausse bonne idée. Ah clairement ça nous a coûté moins cher à l’achat. Mais on a perdu tellement de temps à l’exécution qu’on a repayé le budget économisé avec des intérêts ! »

Du coup, vous venez d’identifier qui peut mettre à mal votre stratégie de fournisseur unique : les acheteurs. Mais comme eux aussi sont intéressés au succès du projet, si vous pouvez quantifier le surcoût lié aux sources multiples, vous avez des arguments intéressants à aller leur présenter. En dissipant le flou, vous avez défini une stratégie, et vous savez à qui aller la présenter.

Et ça ne vous a coûté que deux (bonnes) questions de plus !

La règle à retenir :

Quelques questions pertinentes pour dissiper un écran de fumée

Mettons que votre prospect affirme avoir besoin d’une facette de votre solution (existante où à créer). Dans l’exemple de l’App de chantier, ça pourrait être un module qui n’existe pas encore. Ou dans mon exemple précédent, l’affirmation de la nécessité d’avoir un vendeur unique. Pour creuser un peu le sujet, vous pouvez poser les questions suivantes :

  • Pourquoi est-ce que vous voulez ça ?
  • Qu’est-ce que ça vous permettrait de faire ?
  • Comment est-ce que vous faites sans aujourd’hui ?
  • Est-ce que vous pensez que nous devrions reporter notre projet commun pour ajouter cette fonctionnalité supplémentaire ou est-ce qu’on pourrait l’ajouter plus tard ?

Si le flou vous semble révéler un signal émotionnel, là encore, creusez (rappelez-vous qu’on prend des décisions émotionnelles pour des raisons rationnelles!)

  • Dites m’en plus à ce sujet
  • Ca a l’air de vous énerver, je parie qu’il y a une histoire là derrière
  • Qu’est-ce qui rend ça si affreux ?
  • Pourquoi vous n’avez pas pu résoudre ça jusqu’ici ?
  • Ca a l’air de vous enthousiasmer. C’est un gros problème ?
  • Pourquoi ça vous réjouit autant ?
  • Continuez, ça m’intéresse !

Petit exercice : testons vos bases, s’agissant de poser des questions pertinentes

On l’a vu, une bonne partie du problème vient de vos questions, pour ce qui est de la qualité des réponses de vos prospects. Et surtout ne vous inquiétez pas, ça m’arrive tous les jours de poser des mauvaises questions. L’important, c’est de rester attentif, et de savoir rebondir derrière, le cas échéant.

Je vous propose donc un petit exercice. Dans la liste suivante, il va y avoir des questions pertinentes, d’autres qui peuvent l’être si vous enchaînez bien derrière, et enfin certaines qui sont clairement à bannir. Pour chacune, essayez vous même de les classer, avant que je vous donne ma réponse !

On va commencer avec une facile :

« Est-ce que vous pensez que c’est une bonne idée ? »

La clairement, c’est peut être la pire question que vous puissiez poser. C’est orienté, ça appelle un mensonge ou un compliment pour masquer un désintérêt. En lieu et place de cette question, interrogez votre prospect sur les hypothèses qui ont engendré votre idée. Si vous ne vous êtes pas trompé sur le problème, il y a de fortes chances pour que votre solution soit bonne.

Rappelez-vous : les opinions n’ont pas de valeur.

« Achèteriez-vous un produit qui résout ce problème ? »

Encore une fois, mauvaise question. Une écrasante majorité de prospects va vous répondre « Oui ». C’est gratuit et ça n’engage à rien ! En lieu et place, là encore, questionnez le problème. Comment est-ce qu’ils le résolvent aujourd’hui ? Combien ça leur coûte ? S’ils ne l’ont pas résolu, pourquoi ? Est-ce qu’ils ont au moins essayé ?

Règle simple : s’ils n’ont pas essayé de résoudre le problème avant de vous rencontrer, c’est sans doute que ce n’est pas un problème

Deuxième règle simple : s’il y a déjà une solution simple à ce problème, ça va être super compliqué de différencier la votre.

« Combien payeriez-vous pour résoudre ce problème ? »

Alors, disons que c’est moins pire que la précédente. Mais c’est potentiellement encore plus dangereux, parce que l’aspect chiffré de la réponse va vous donner une illusion de science. Ca reste de la boule de cristal.

Si vraiment vous êtes si avancés dans les spécifications de votre produit que vous ne cherchez plus à l’amender mais simplement à tester ses voies d’accès au marché, partez plutôt sur une méthode à la kickstarter : vendez le aujourd’hui avec la promesse de le livrer dans le futur. Là l’action de payer ne se conjugue plus au conditionnel, mais au présent, vous êtes dans le concret.

« A quoi ressemblerait la solution idéale ? »

Bon, là on est dans la zone « peut être pertinent », si vous enchaînez bien derrière. Vos prospects vont décrire leur vision du futur. A vous d’ancrer chacune de leurs demandes dans le concret et dans le passé, en questionnant les raisons qui les sous-tendent. Quelles sont leurs motivations, leurs besoins. Des questions pertinentes pour enchainer derrière seraient ici : « Pourquoi est-ce que vous voulez ça ? » ou « Qu’est-ce que ça vous permettrait de faire ? » comme on l’a vu tout à l’heure.

Rappelez-vous : vos prospects connaissent leurs problèmes, mais ne savent pas comment les résoudre : ça c’est votre job.

« Pourquoi vous donner cette peine ? »

Excellente question. Rappelez-vous, c’est une variation de la question provocante que je vous avais déjà suggérée pour briser la glace en Rendez-Vous : « Pourquoi avoir accepté ce rendez-vous ? ». Vous renversez la vapeur, vous n’être plus en train de leur vendre une solution. Avec ce type de questionnement, c’est votre prospect qui vous expose ses problèmes, ses enjeux, sa douleur ressentie.

Ca aussi on en a déjà parlé : quand vous vous attaquez au « pourquoi », vous êtes généralement au bon endroit !

« Quelles sont les conséquences de ce problème ? »

C’est évidemment une question pertinente. Vous approfondissez le problème d’une part, et de l’autre, vous différenciez clairement les problèmes pour lesquels vos prospects sont prêts à payer pour trouver une solution, et les problèmes qui sont embêtants, mais avec lesquels ils peuvent vivre.

Petite règle à retenir : certains problèmes ne sont pas importants. Sachez les détecter !

« Racontez moi la dernière fois que c’est arrivé »

Excellente question, évidemment. Il paraît qu’une image vaut mille mots : une histoire c’est la version imagée d’un problème. En vous racontant cette histoire (et si vous vous rappelez des épisodes 8 et 9 de ce podcast, vous connaissez la force des histoires !), vos prospects vont vous rapporter leurs actions passées plutôt que leurs opinions. Je me répète, mais c’est exactement ce que vous cherchez !

Notez qu’en plus, vous risquez d’identifier les vrais problèmes au passage, qui ne sont pas forcément toujours ceux que votre prospect aura identifiés.

« Est-ce que vous avez déjà essayé autre chose, et si oui, quoi ? »

Encore une question pertinente ! S’ils n’ont jamais rien essayé d’autre, on a déjà vu qu’il y a de bonnes chances que ça ne soit pas vraiment un problème. Et si la solution, même rafistolée a l’air de fonctionner, il est important de comprendre ce qui les satisfait dans cette solution, combien elle leur coûte (pas seulement financièrement) et quelle serait la difficulté et la résistance au changement.

« Qui est-ce qui paye ? »

Il y a mille façons de poser cette question. Et elles sont toutes bonnes : osez la poser, il est primordial de savoir quel budget sera impacté par une décision de ce type. Et si jamais la réponse est, que ce n’est ni de près ni de loin votre interlocuteur, prenez tout ce qu’il va vous dire désormais avec des pincettes. Ce qui vous donne aussi un petit spoiler pour la question suivante :

« À qui d’autre devrais-je parler ? »

… qui est évidemment une question pertinente. Probablement déjä, la personne qui risque de payer, identifiée avec la question précédente ! C’est surtout la meilleure façon de conclure tout entretien – prenez cette habitude, ça ne coûte rien et ça rapporte beaucoup. Quand vous débutez, il est difficile d’ouvrir des portes, mais une fois que vous avez le pied dedans, profitez-en pour en faire ouvrir d’autres.

Et si votre prospect ne veut pas vous aider à ce stade, c’est aussi un signal intéressant à relever : soit vous avez fait de cette conversation une épreuve douloureuse (on y reviendra), soit ils n’en ont pas grand chose à faire du problème que vous résolvez. Donc, vous pouvez vous interroger sur la valeur de leurs réponses jusqu’ici.

« Est-ce qu’il y a quoi que ce soit d’autre que je devrais avoir demandé ? »

Voilà une question moins évidente. Mais c’en est une excellente ! Surtout si vous débutez, vous risquez de passer tout l’entretien à tourner autour du pot, sans même vous en rendre compte. Les gens ont un bon fond, ils veulent vous aider : donnez leur une excuse pour le faire. Vous montrez une certaine vulnérabilité c’est l’effet « Pratfall » – je ne sais pas si ça se traduit, toutes mes excuses pour l’anglicisme – dont on va reparler prochainement (je vous prépare une série sur les biais cognitifs).

Notez au passage les questions qu’on va vous suggérer, et intégrez les à votre boite à outils pour vos rendez-vous suivants. Logiquement avec l’expérience, au bout d’un certain temps vous ne devriez plus avoir à poser cette question (mais ça ne vous coûtera rien d’autre que de la sympathie de continuer à le faire).

C’est une conversation, pas un interrogatoire !

Dernier conseil pour cette semaine : vous n’êtes pas un policier et vos prospects ne sont pas des suspects. Si vous les assaillez de questions, ils vont être sur la défensive et chercher à éluder jusqu’à pouvoir mettre fin à l’épreuve que vous leur infligez.

Au contraire, si vous pouvez tourner l’ensemble de cette expérience en une conversation plaisante, ils ne réaliseront même pas que vous posez des questions, et ils vont peu à peu baisser leur garde. Vous en apprendrez donc plus sur eux, et vous serez d’autant plus susceptibles d’identifier des points saillants et donc de pouvoir les aider. Vous inquiétez pas, on y reviendra plus en détail la prochaine fois.

Note (personnelle) finale

A la fin de cet épisode, je vous dis « à bientôt » mais je vous promets pas que ça sera la semaine prochaine, même si je vais essayer. J’ai toujours pas repris mes déplacements, et du coup il me manque toujours ce temps de latence dans les aéroports qui a été le berceau de chaque épisode de ce podcast. Mais je vous promets que dans tous les cas, il y aura pas plusieurs mois d’attente non plus !

J’ai été très touché de voir que vous étiez très nombreux à télécharger ce podcast ces dernières semaines, alors même que j’ai été pas mal absent. Je vous cache pas que c’est une super motivation pour moi, qui me pousse à trouver du temps pour partager avec vous.

Depuis le mois de juillet, je publie toutes les semaines un podcast d’interviews en anglais, où je m’entretiens avec des PDG et des fondateurs de start-ups dans le domaine du traitement de l’eau, ce qui est une aventure passionnante mais chronophage. Ca me donne aussi plein d’idées à développer et partager avec vous ici, sur Ingéventes.

Bref, vous voyez avec cet épisode, que je me suis enfin attaqué à la thématique des questions dans la vente, qui me tient à coeur, sur laquelle j’ai pas mal de choses à dire, mais que je n’avais pas encore structurée. Je prévois d’en faire une série dans les prochaines semaines, et je vous synthétiserai tout ça dans mon ebook sur les questions. si vous ne l’avez pas encore fait, vous pouvez vous inscrire sur la liste d’attente, et je vous l’enverrai gratuitement à sa sortie.

D’ici là, rendez-moi un grand service : partagez cet épisode autour de vous, sur LinkedIn ou sur TikTok, et recommandez ce podcast à un ami, un proche ou un comptable. A très bientôt !

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Aller vers les autres chapitres de ce dossier :

Vendre comme Socrate, un jeu dangereux ?

L’écoute active : cet art chinois ancestral absolument indispensable !

Quelles sont les questions à poser, et dans quel ordre ?

Comment obtenir le droit de poser des questions ?

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