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L’Effet Dunning Kruger : Vous en savez MOINS et PLUS que vous ne le pensez !

On est tous incapables d’estimer notre niveau de compétence réel. Et le pire dans tout ça, c’est qu’on pense être les maîtres absolus d’un sujet quand en fait on n’en sait pas grand chose. Alors que dans le même temps, les vraies références du sujet se trouvent plutôt incompétentes ! C’est tout le paradoxe de l’effet Dunning Kruger.

Cet épisode s’insère dans le grand ensemble de mon dossier sur les biais cognitifs appliqués à la vente.

Aux origines, il était Dunning, Kruger et un très mauvais braqueur

La découverte de ce biais cognitif est assez récente, et doit beaucoup à McArthur Wheeler, qui était pourtant tout sauf un génie. Le brave homme avait décidé de braquer deux banques, à Pittsburgh. Mais surtout, il avait eu la meilleure idée de tous les temps : attaquer ces banques en plein jour et sans masque !

Pourquoi ? Oh ben tout simplement parce qu’il s’était badigeonné le visage de jus de citron. Et puisque ça a le pouvoir de rendre l’encre invisible, il était parfaitement logique que ça en fasse tout autant pour sa peau. Sauf que – et je dis ça pour les apprentis braqueurs qui pourraient m’écouter – SCOOP : ça ne marche pas du tout.

McArthur a été arrêté, et la presse a bien rigolé de sa bêtise. Ce qui a attiré l’attention de David Dunning et Justin Kruger, deux psychologues sociaux des universités de New York et du Michigan. Ils ont donc cherché à comprendre si l’ami Wheeler était complétement con. Et manque de bol pour nous tous, pas vraiment : son idée débile révèle en fait un biais de notre cerveau, qui finira par porter le nom des deux chercheurs, l’effet Dunning Kruger.

L’expérience de Dunning et Kruger

Ce qui a forgé la conviction des deux chercheurs, c’est leur étude d’un panel de 194 étudiants. Ils leur ont fait faire des tests de logique et de grammaire, avant de leur demander d’estimer la qualité de leurs réponses, comparées à celles des autres participants.

Premier résultat étonnant : quand on leur demandait de se classer, les étudiants estimaient en moyenne être dans le premiers tiers de la classe. Bon, si vous vous y connaissez un minimum en statistiques vous voyez le problème . Normalement, en moyenne, on est au milieu. Donc, la plupart de nos cobayes se pensaient bien meilleurs qu’ils ne l’étaient.

Mais là où cet écart était encore plus important, c’était chez les plus mauvais. Ceux qui, en pratique, étaient dans le dernier quart au classement, pensaient en fait être parmi les meilleurs 40%.

Cet expérience révèle donc l’effet Dunning Kruger : on estime très mal notre compétence, et encore plus mal notre incompétence.

Peut être que cette découverte va réhabiliter tous les premiers de la classe qui sortaient d’interro au collège en pensant avoir « complètement raté » avant d’obtenir un 18. Ils étaient pas en train de crâner, ils étaient victimes de leur cerveau et de ses biais !

Dunning Kruger ou comment compliquer (encore) les relations entre collègues – Source: Dilbert

Ca ne va pas en s’arrangeant

La découverte de ce biais est assez récente : les travaux de Dunning et Kruger ont été publiés au début des années 2000. Et pourtant depuis, on ne s’est pas améliorés collectivement sur le sujet, bien au contraire.

Il y a par exemple eu des études depuis qui ont démontré que plus on fournissait de données sur des chevaux à des parieurs hippiques, et plus ils avaient tendance à considérer leurs pronostics comme infaillibles, à tort.

Mais plutôt que de nous concentrer sur des recherches, on va illustrer ça avec un exemple bien concret. Parce que oui, moi aussi je peux faire dans l’excès de confiance et me prendre pour un chercheur.

Dans le monde d’avant, on disait que la France avait 60 millions de sélectionneurs pour son équipe de foot – et c’est faux, à part moi, personne n’est meilleur que Didier Deschamps.

Mais depuis le début de la pandémie de CoVid, on a tous fait des études de médecine en accéléré, pour arriver à 60 millions d’épidémiologistes.

Et pendant que des professeurs ayant passé des décennies à étudier les Coronavirus étalent leurs incertitudes sur les plateaux télé – premier effet Dunning Kruger, quand, étant un réel expert de la question, on sous-estime sa compétence – d’autres se mettent à claironner leur propre « savoir » acquis en regardant deux vidéos sur youtube. Deuxième effet Dunning Kruger : l’excès de confiance, alors qu’on sait presque rien d’un sujet.

Les « Covidiots », victimes de Dunning Kruger ?

L’effet Dunning Kruger magnifié : les certitudes des Covidiots (OK, je juge, pardon.)

Sans vouloir digresser vers les ressorts des théories du complot, je voudrais juste m’arrêter ici sur la présence de tous les symptômes de l’effet Dunning Kruger. Quelques connaissances glanées à droite et à gauche (j’essaye de pas être dans le jugement, donc j’ai pas mis connaissances entre guillemets) constituent un « savoir » (ah merde, là j’ai pas pu m’en empêcher). Et tout en confiance dans ce savoir, on retrouve nos néo-médecins devant toutes les caméras, pour clamer leurs certitudes.

Mais, ces braves gens ne sont dans le fond pas plus à blâmer que ne l’était notre braqueur de banque. Ils sont victimes de leur cerveau (tu m’étonnes entre les nano-particules qu’il y a dedans et la 5G…)

Comment appliquer ce biais cognitif à la vente ?

Il y a à mon sens trois applications de l’effet Dunning Kruger à la vente.

La première s’applique à nos clients, et est sans doute la plus difficile à mettre en oeuvre avec tact. La plupart de nos prospects seront d’une manière ou d’une autre dans l’excès de confiance par rapport à leurs compétences, sur notre propre sujet d’expertise.

Par exemple, si vous êtes électricien ou expert SEO, un client qui aurait vu trois tutos sur youtube va penser qu’il en sait autant que vous. Et que donc, il peut soit vous passer une commande partielle – et faire le reste lui-même, soit commencer à vous attaquer sur votre prix exorbitant, puisque votre prestation elle est pas bien compliquée hein, il pourrait le faire à votre place s’il avait le temps.

Vous ne pouvez pas contrer l’excès de confiance frontalement : il va donc falloir déployer vos meilleures histoires pour lui montrer comment des clients comme lui, ont pensé, comme lui, être bien plus calés qu’ils ne l’étaient. Et comment ça a mal fini pour eux.

Les deux autres s’appliquent au vendeur

Ensuite, n’oubliez pas qu’on est deux dans cette danse. Et que nous autres, vendeurs, sommes tout aussi exposés à l’effet Dunning Kruger.

Souvent, après avoir fait nos devoirs et recherché le contexte de notre prospect sur LinkedIn ou Google, on pense à tort tout savoir d’eux. Et on en oublie de leur poser des questions, ce qui nous fait un peu foirer l’entretien de découverte – un peu étant un euphémisme.

La deuxième application a à voir avec notre compétence. A force de baigner tous les jours dans notre sujet, on pense que les choses qu’on sait sont l’évidence même – et que donc tout le monde les connaît. Et on est aussi parfaitement conscients de ce qu’on ignore, ce qui nous pousse à sous-estimer notre propre compétence.

Du coup, on peut se retrouver dans une discussion surréaliste ou un prospect, en plein excès de confiance, nous fait la leçon sur notre coeur d’expertise, pendant que nous on est bridés par un pseudo-syndrome de l’imposteur.

Bref, luttez contre votre cerveau et ses biais : utilisez vos connaissances pour conseiller vos clients au mieux, faites-vous confiance, et questionnez leurs propres certitudes, quand objectivement vous avez toutes les raisons de penser qu’ils se trompent.

Il y a bien une dernière opportunité pour employer l’effet Dunning Kruger à votre avantage, mais elle est du côté obscur de la force alors je vais pas m’attarder. Vous pouvez vendre votre produit, service ou solution, en disant qu’il s’adresse aux experts – pas au client moyen. Comme votre prospect se surestime, il s’estime comme un expert. Donc, il pensera que c’est fait tout pile pour lui. Pas très élégant comme méthode, mais bon, ça marche.

Conclusion

Quand on y connait pas grand chose, on pense tout savoir. Et quand on connaît presque tout, on a l’impression de ne rien maîtriser : c’est quand même mal foutu parfois, le cerveau. Mais maintenant, vous saurez comment contrer ce biais de votre matière grise !

Si vous avez des amis, des proches ou des comptables qui pensent tout savoir – alors qu’ils y connaissent pas grand chose à la vente, n’hésitez pas à leur partager cet épisode ! Et inversement, si vous avez le sentiment qu’ils sous-estiment leur compétence, partagez-leur aussi cet épisode pour leur montrer comment un gars avec la moitié d’une idée – moi – s’estime à tort expert de la question. A bientôt !

Vous voulez devenir commercial ? Je vous aide (gratuitement) à construire votre carrière sur des bases saines (et performantes) !


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