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Biais de confirmation : Comment ne voir que ce qu’on a envie de voir

Y a jamais eu autant d’informations disponibles qu’aujourd’hui, pas étonnant que notre cerveau cherche à les trier ! Le problème, c’est qu’il a tendance à ne retenir que ce qui l’arrange, en gros, ce qui s’accorde avec ses convictions pré-établies. C’est le biais de confirmation !

Ce focus sur un « tube » des biais cognitifs fait partie de mon dossier ultime sur leur application à la vente.

Un match de football américain révèle le biais de confirmation

La première référence explicite au biais de confirmation date d’une étude d’Albert Hastorf et Hadley Cantril, publiée en 1954. L’étude s’intéresse à un match de football américain qui a opposé Princeton à Dartmouth en 1951.

Après même pas 2 minutes de jeu, Dick Kazmaier, le Quaterback deux fois All-Star de Princeton s’est retrouvé avec un nez cassé. Derrière, le match a été si violent que du côté de Dartmouth le Quaterback s’est lui fait casser la jambe. Bref, une boucherie.

Ce qui a attiré l’attention des deux psychologues, c’est que les journaux avaient une lecture diamétralement opposée du match, selon qu’ils soient affiliés à une université ou à l’autre. Ils ont donc recruté deux panels d’étudiants sur chaque campus, en s’assurant qu’ils n’avaient pas vu le match, ni en live, ni sous forme de film. Oubliez pas qu’on est en 1952 à ce moment là et que le streaming n’existait pas !

Ils ont ensuite montré à chacun des quatre panels un enregistrement du match. Après ça, chaque étudiant devait remplir un questionnaire et vous allez voir que les réponses ont été assez surprenantes.

C’est qui les méchants ?

Après avoir vu un enregistrement pourtant rigoureusement identique, les deux panels de Princeton étaient en désaccord total avec les deux de Dartmouth. Ils étaient par exemple 86% côté Princeton à trouver que c’était Dartmouth qui avait commencé à jouer agressivement, contre 36% côté Darmouth.

Pour ce qui est de l’accusation que Dartmouth aurait pourri la partie exprès, côté Princeton on trouvait ça rigoureusement ou partiellement exact à 90%. Dans le même temps, Dartmouth trouvait ça absolument ou partiellement faux, là aussi à 90%.

Bref, statistiques à l’appui, Hastorf et Cantril ont prouvé que l’interprétation de faits identiques – le film du match – était totalement différente selon les convictions pré-existantes des spectateurs – c’est Dartmouth les gentils, à Dartmouth, c’est Princeton les gentils, à Princeton. Et ils ont donné un nom à ce biais cognitif : le biais de confirmation.

C’est d’ailleurs facile de vérifier à quel point ce biais s’applique au football – au vrai cette fois-ci. Dans la dernière demi-finale de ligue des champions entre Lyon et le Bayern, j’aurais pu siffler au moins trois penaltys pour Lyon, alors qu’à chaque faute des Gones, d’après moi il y avait rien du tout. Bon, c’est rigolo, mais vous allez voir qu’on retrouve en fait le biais de confirmation un peu partout.

Le biais de confirmation aujourd’hui

Si par exemple vous pensez que le réchauffement climatique est une arnaque, mettons qu’il neige en mai, vous allez voir ça comme une preuve renforçant votre conviction et vous allez vous en souvenir. Si par contre je viens vous rappeler qu’il a pas neigé en décembre, déjà vous l’aurez oublié, ensuite vous allez m’expliquer que c’est anecdotique.

Dans la même veine, si vous pensez que le monde est de plus en plus violent, je peux vous montrer toutes les statistiques de victimation que je veux, prouvant objectivement que c’est pas le cas, chaque nouveau fait divers dans l’actualité va venir renforcer votre conviction et c’est ça que vous allez retenir, pas mes graphiques.

En fait, le biais de confirmation agit comme un filtre. Il va concentrer notre attention uniquement sur ce qui va dans le sens de ce qu’on sait déjà. Parce que c’est reposant. Parce que c’est rassurant.

En fait, si vous suivez bien, ça s’applique même deux fois : non seulement on ne va voir que ce qu’on veut voir, mais en plus même si on nous impose quelque chose qui va à l’encontre de nos convictions, on ne va pas le retenir.

Quelques applications pratiques du biais de confirmation

Mettons par exemple que je sois arrêté au feu rouge au bout de ma rue. Statistiquement, il y a une chance sur deux. Pourtant si je suis convaincu de pas avoir de chance, et de toujours me taper ce feu rouge, je vais le remarquer à chaque fois que ça m’arrive, et pas toutes les autres ou je passe au vert. Et dans ma mémoire, ce feu est toujours rouge.

Le biais de confirmation va aussi nous pousser à éviter de chercher une information en décalage avec nos convictions. Si je suis de gauche, je vais pas lire le Figaro, si je suis de droite je vais fuir l’Humanité ou Libération.

On l’a déjà vu avec les deux facs rivales, le biais de confirmation va enfin me faire interpréter de façon différente un même événement. Si par exemple, en me promenant dans la rue, un pot de fleur tombe à côté de moi, je vais y voir un coup de bol et une coïncidence si je suis athée et un signe d’intervention divine si je suis croyant.

Bref, notre cerveau est un sacré fainéant qui ne veut pas changer d’avis, et on est tous des monstres de subjectivité !

Le biais de confirmation, appliqué à la vente

Quand on veut vendre un produit, un service ou une solution, en schématisant très grossièrement, il y a trois types de prospects. Ceux qui adorent ce qu’on a à vendre, et qui vont l’acheter quoi qu’il arrive. Heureusement, ils sont pas si nombreux, sinon on servirait à rien, nous les commerciaux !

Nos plus grands fans sont victimes du biais de confirmation, mais en notre faveur !
– On est tes plus grands fans !
– Mais vous voulez me faire virer bande de tocards ?!

Ceux qui n’ont pas d’avis vraiment arrêté et qui ne demandent qu’à être convaincus, dans un sens ou dans l’autre. Et enfin ceux qui détestent d’avance ce qu’on a à proposer.

Du coup, la première application du biais de confirmation, c’est de commencer par éviter autant que possible la dernière catégorie. Parce qu’on pourra leur raconter tout ce qu’on veut, comme ça heurte leurs convictions, ils vont pas le retenir et surtout former tout un tas d’objections, voire même ensuite d’objections aux réponses aux objections.

Donc à choisir, il vaut mieux discuter avec les prospects neutres – puisque bon, normalement il y a pas besoin de convaincre nos superfans, ils le font déjà très bien tous seuls.

On n’a pas toujours le choix

Le problème c’est qu’on a pas toujours le choix. Du coup, des fois, on se retrouve à devoir convaincre des opposants farouches.

C’est là qu’une étude menée en 1964 par Leon Festinger et Nathan Maccoby devient très intéressante. Les deux chercheurs de l’université de Stanford ont soumis deux versions d’une vidéo à deux panels de cobayes. (désolé, ça fait beaucoup de « 2 »)

La différence entre le premier et le deuxième panel, c’était que l’un était constitué de membres de fraternités étudiantes, et pas l’autre. La vidéo elle, elle dénonçait tous les travers des fraternités. Dans sa première version, c’était un conférencier, face caméra qui démontrait par A+B en quoi elles étaient une très mauvaise chose. Et dans la deuxième version, on retrouvait la même bande sonore du conférencier, mais montée sur des images complètement différentes.

Vous vous doutez bien que le panel avec les membres de fraternités était pas du tout d’accord avec les arguments du conférencier. Pour eux les fraternités c’est génial ! Et dans une démonstration magistrale du biais de confirmation, la conférence captée face caméra n’a pas changé leur opinion sur le sujet, ne serait-ce que d’un pouillème. La deuxième vidéo par contre, avait tendance à leur ouvrir les yeux : ils se mettaient à admettre que les orgies alcoolisées, ça avait pas que du bon.

Pour le deuxième panel, les deux vidéos avaient exactement la même efficacité. Alors qu’est-ce que ça montre ?

Le biais de confirmation peut se contourner

Comme le deuxième panel n’avait pas d’opinion pré-établie sur le sujet, le biais de confirmation ne s’est jamais mis en travers de l’argumentation du conférencier. Qu’il soit face-caméra ou en voix-off d’un film totalement différent.

Pour le panel avec une opinion ancrée par contre, l’attaque frontale était tout à fait inefficace. Mais en distrayant l’attention des cobayes avec le film, c’était possible de changer un peu leur convictions, en arrière plan.

Ce que ça démontre c’est que le biais de confirmation est un biais cognitif actif. Notre cerveau fait activement l’effort d’ignorer ce qui nous plait pas et de construire des objections.

Donc une stratégie intéressante pour contourner les a-priori négatifs de nos prospects, c’est de détourner leur attention au moment de faire passer notre message. Ca peut être en les emmenant déjeuner, ou encore mieux, en leur proposant de faire une réunion-promenade. En plus il y a des chances qu’on le leur propose pas tous les jours, ce qui devrait jouer en votre faveur, par effet von Restorff.

Qu'est-ce qui viendra après le biais de confirmation dans notre série sur les biais cognitifs ?
Super teaser non ?

Conclusion

Du football au réchauffement climatique, en passant par la politique ou, ce qui nous intéresse un peu plus, la vente, le biais de confirmation joue un rôle important dans la façon dont on cherche, interprète, mémorise ou ignore des informations.

Du coup, si vous pensez que les biais cognitifs peuvent influencer nos décisions, vous avez forcément aimé cet épisode, que du coup vous allez vous empresser de partager à un ami, un proche ou un comptable.

Si vous pensez au contraire qu’on est des êtres rationnels, absolument hermétiques aux petits raccourcis de notre cerveau, vous devriez plutôt vous abonner au podcast, comme ça j’aurai une chance de vous convaincre en arrière-plan pendant que vous ferez la vaisselle. A bientôt !

Vous voulez devenir commercial ? Je vous aide (gratuitement) à construire votre carrière sur des bases saines (et performantes) !


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